Ce couple d’origine hispanique a trois enfants. Ils habitent en grande banlieue de La Nouvelle-Orléans. Tous deux travaillent dans le centre-ville, lui est agent de sécurité en mairie, elle, aide-soignante à l’hôpital. Cette famille est représentative des classes américaines modestes, aux conditions de vie difficiles. En particulier, celles d’immigration récente, essentiellement dans la communauté hispanique.
Les parents travaillent dur, fortement motivés par les promesses d’amélioration de la condition sociale et de réussite de l’Amérique. Leur vie quotidienne est rendue difficile par les temps de transports pour aller travailler. Rentrant tard et ayant souvent des horaires décalés, les parents ont peu de temps à consacrer à leur vie de famille.
Quelle transition énergétique pour cette famille ?
La transition énergétique est
difficile à intégrer dans le mode de vie de cette famille, tiraillée entre ses aspirations d’intégration et de réussite et ses difficultés au quotidien. Cependant, cette famille pourra évoluer grâce à l’
apprentissage progressif au recyclage pour éviter le gaspillage et à une sensibilisation aux
risques d’ouragans.
Cette famille est réceptive au message de l’Encyclique sur l’écologie (« Laudato si’ ») diffusé dans sa communauté religieuse. Le pape François y invite chacun « à un nouveau dialogue sur la façon dont nous construisons l’avenir de la planète ».
Emissions de dioxyde de carbone (en tonnes équivalent CO2)
par personne de la famille de classe moyenne américaine en 2015
Les Etats-Unis n’ont pas fait connaître de façon détaillée leurs émissions sur les gaz autres que le CO2. Si on compte le CO2 seulement, pour contenir le réchauffement climatique à 2 °C en 2050, le chiffre plafond est de 1,1 t de CO2 par personne par an.
Cette famille est en deçà des émissions moyennes émises par Américain en raison notamment de ses conditions de vie modestes.
Les Etats-Unis confrontés à des limites énergétiques
Un logement peu énergivore
Cette famille habite
une maison individuelle de 120 m² construite à la fin des années 1970. Elle a fait l’objet
d’une réhabilitation légère.
La Nouvelle-Orléans a un climat tropical doux. Cela n’exclut pas
des températures assez basses de décembre à février et souvent négatives. L’été est chaud et humide, mais la température n’atteint les 40°C qu’exceptionnellement.
Les consommations pour le logement concernent donc davantage la climatisation et la ventilation que
le chauffage limité à trois mois dans l’année.
Le casse-tête des transports
Les parents habitent
loin de leur travail, au nord-ouest de la ville en direction de
Bâton-Rouge. Ils passent chaque jour des heures dans les
autoroutes embouteillées qui convergent vers le centre de la ville. Bâton-Rouge, construite dans
le delta du Mississippi, est environnée
de nombreux lacs dont le contournement rend la
circulation difficile.
L’insuffisance de transports collectifs place les familles en situation de
totale dépendance vis-à-vis de la voiture.
Les transports sont dépendants à 95% du pétrole. Il y a environ un milliard de voitures dans le monde. Six cents voitures pour 1 000 habitants en Europe, sept fois moins en Chine et quarante fois moins en Afrique subsaharienne. Le parc automobile mondial augmente chaque année de 3%, essentiellement aujourd’hui dans les pays émergents.
La plupart des
villes américaines sont très étendues, les
distances à parcourir sont considérables. Cette famille modeste a dû s’adapter et trouver
un logement éloigné à un prix abordable, quitte à passer
plusieurs heures par jour en voiture pour les
déplacements domicile-travail.
Evolution de l’usage du mode de transport
(Emissions de dioxyde de carbone (CO2) en kilos par famille)
Deux voitures à essence, une camionnette
Travail :
1 942 kg
Loisirs, vacances :
12 kg
Une berline routière à essence hybride, une voiture à gaz, avion
Travail :
706 kg
Loisirs, vacances :
69 kg
Une berline routière à essence hybride, une voiture à gaz, avion
Travail :
317 kg
Loisirs, vacances :
14 kg
La vulnérabilité au changement climatique
Cette famille ne s’était jamais préoccupée du changement climatique jusqu’au
passage de l’ouragan Katrina. Le 23 août 2005, les vagues de l’océan ont submergé les digues et les ont détruites. L’eau a envahi la ville située en dessous du niveau de la mer. Cette catastrophe, qui a fait plus de
1 800 morts et 140 000 sinistrés, a clairement montré l’intérêt de
sensibiliser la population. Plus l’alerte est donnée tôt, mieux elle peut se protéger.
Lorsque Katrina a frappé La Nouvelle-Orléans,
la demande d’évacuation par le maire de la ville est arrivée tard et surtout n’a pas été comprise. L’organisation des secours a été défaillante.
La montée des eaux, atteignant 6 m dans certaines parties de la ville,
a piégé de nombreuses personnes, faute de
moyens de transport pour les évacuer.
Le 29 août 2005, après le passage de l’ouragan Katrina à la Nouvelle Orléans.
L’adaptation au changement climatique ne nécessite pas seulement la construction de digues ou d’autres ouvrages. Il est indispensable que des décisions d’urbanisme soient prises pour
ne pas construire en zones inondables. Une culture collective d’apprentissage des risques et des comportements adaptés doit être largement diffusée au sein de la population.
L’importance du recyclage des déchets
La gestion des déchets, dans une ville au sous-sol gorgé d’eau, est une
question cruciale.
Les
eaux de surface ou les nappes phréatiques sont polluées par
la diffusion des ordures depuis les décharges.
Il s’agit essentiellement de
déchets organiques issus de l’agriculture et de l’alimentation des ménages. Leur décomposition en décharge ou dans les eaux provoque
des émissions de méthane dont le pouvoir de réchauffement est vingt fois plus fort que le gaz carbonique.
La mère a convaincu toute la famille de la
nécessité de recyclage des déchets et de compostage des déchets organiques qui ne doivent plus être
enfouis en décharge.
Chaque année près de
4 milliards de tonnes de déchets sont générés sur la planète. Une étude réalisée en octobre 2015 par l'association
Zero Waste montre qu’
une réduction de la production de déchets par habitant, l'amélioration de
leur traitement et un meilleur recyclage des matières peuvent jouer un
rôle important dans la réduction des émissions de gaz à effets de serre.
Si
le recyclage d'une tonne d'emballages en plastique permet d'
éviter 500 kg d'équivalent CO2, l'utilisation d'une tonne de plastique de moins permet d'
économiser six fois plus d'émissions, soit trois tonnes d'équivalent CO2.
Aux Etats-Unis,
l’industrie du recyclage est bien implantée sur la côte ouest et
représente 236 milliards de dollars, 1,1 million de salariés et 56 000 entreprises. Certaines villes ont adopté
une politique volontariste pour le traitement des déchets, telle San Francisco qui, en 2014, a obtenu
un taux de 80% de recyclage.
Vivre sans générer de déchets dans notre société actuelle est possible. «
Béa zéro déchets » le prouve au quotidien et
fait des émules. Cette mère de famille d'origine française vit à côté de San Francisco et applique le minimalisme dans tous
les actes de la vie courante. N'hésitant pas à parcourir les magasins, avec
des bocaux, des sacs en tissu et des cabas pour y mettre tous
les aliments achetés en vrac pour ne pas avoir à
jeter d'emballage. Un principe lié à son
engagement pour l'environnement qui a l'avantage de faire
baisser les prix et lui a permis d'arriver à près de
40% d'économies au fil du temps.
Une transition énergétique compliquée
Les émissions de cette famille restent
importantes bien que ses consommations soient modestes et qu’elle bénéficie d’
un climat clément. Dans le cas de cette famille, ce sont les émissions de gaz carbonique liées au transport qui pèsent le plus. Elles seront, dans le futur, difficiles à réduire, car les
distances sont trop longues pour envisager
des véhicules électriques. La transition énergétique de cette famille est
dépendante des politiques publiques futures dans les secteurs les plus pollueurs, en particulier les transports et l’industrie américaine, le secteur pétrochimique notamment.
Evolution des émissions de dioxyde de carbone (en tonnes équivalent CO2)
par personne de la famille de classe moyenne américaine
La prospective 2050 concernant les Etats-Unis est basée sur les travaux du Deep Decarbonization Pathways Project lancé par l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Celui-ci
table sur une forte croissance de la capacité industrielle américaine entre 2010 et 2050, en augmentation de
plus de 50%. La réduction drastique des émissions reste difficile, même si
la part des énergies renouvelables est de plus en plus importante dans
la production d’électricité.