SÉNÉGAL
Le défi de la protection 
 des ressources génétiques locales

En Afrique de l’Ouest, 70% de la production agricole provient des petites exploitations familiales.



Le défi pour les paysans y est de continuer à produire leurs propres semences. Il y va de leur survie économique et du futur alimentaire de la région. L’existence d’une monnaie commune aux pays francophones, le franc CFA, facilite les échanges à tous les niveaux, y compris entre les associations paysannes, qui peuvent ainsi se fournir mutuellement des semences.

En Afrique de l'Ouest, la collaboration entre associations paysannes et chercheurs est à l'ordre du jour. Le petit village de Djimini (Sénégal) se trouve dans la région de Haute Casamance, à onze heures de la capitale Dakar. Ici, tous les deux ou trois ans, à l'occasion de la Foire des Semences, Djimini devient un véritable point de rencontre entre agriculteurs, ONG locales et internationales (par exemple, la Française Bede) et chercheurs en provenance de nombreux pays.


Un paysan qui n'a pas de semences est un paysan pauvre"
Alihou Ndiaye


Certains arrivent en bus, d'autres louent des minibus, tout le village entier s'anime autour de cette présence hétérogène et en même temps très soudée. Ici, on ne vend pas de semences, on les échange librement. Et on compare leurs mérites respectifs. Surtout ceux des variétés de mil (le millet, le sorgho, notamment), les céréales les plus répandues dans la région.

Organisés par l'ASPSP (Association sénégalaise des producteurs de semences paysannes) et le COASP (Comité ouest-africain pour les semences paysannes), ces échanges aident les associations paysannes à se mettre en réseau pour faire valoir leurs revendications. « Les grandes entreprises industrielles essaient de voler notre droit aux semences », affirment ces associations.

L’enjeu des semences paysannes



Le saviez-vous ?


Les trois premières multinationales (Monsanto, DuPont Pioneer et Syngenta) contrôlent presque 50% du marché.

La France est le premier pays producteur de semences en Europe et le premier pays exportateur mondial de semences. Les exportations de semences progressent depuis plus de 15 ans et atteignent près de 1 500 millions d'euros.



Les organisations paysannes ouest-africaines demandent une législation qui reconnaisse leur droit à la connaissance et à la gestion directe des variétés locales, et dénoncent la pratique de la certification des semences. D'après elles, le modèle de la certification, inspiré de la législation européenne, n'est pas compatible avec la réalité rurale de l'Afrique de l'Ouest : elle implique des coûts de certification et pose trop de contraintes (notamment celle d'avoir une qualité très homogène et uniforme dans les semences). En plus, elle est utile pour vendre sur le marché global, ce qui n'intéresse pas forcément le petit producteur.

Ce combat légal, qui a pour but l'application réelle du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA (+)), devient ainsi l’un des principaux enjeux pour la souveraineté alimentaire de la région. Le Mali l'a ratifié en 2005, le Sénégal et la Côte d'Ivoire en 2006. Mais il faut ensuite l'appliquer, et c'est là que les droits des agriculteurs sont souvent malmenés.



Comment combiner le besoin de protéger les pratiques traditionnelles en matière de semences avec le besoin d'innovation et de hausse de productivité, dans un contexte de changement climatique ? La solution peut venir d’une nouvelle forme de collaboration entre agriculteurs et chercheurs.

La recherche conjointe entre chercheurs et agriculteurs


En Afrique nous ne produisons pas des voitures ou des ordinateurs. Notre richesse est l'agrobiodiversité."
Jacques NAMETOUGLI



Réunis en associations et réseaux, les agriculteurs ont la possibilité de mieux revendiquer leurs droits et lutter pour un modèle d'agriculture durable. A Djimini, par exemple, dans le cadre de la 4e Foire ouest-africaine des semences paysannes qui a eu lieu en 2014, les représentants de 54 délégations du Bénin, du Burkina Faso, de la Gambie, du Niger, du Mali, du Togo, du Sénégal, de la Guinée, de l’Inde, de l’Europe et du Canada ont adopté une déclaration commune en ce sens. Signe qu’ils veulent pouvoir peser sur les politiques agricoles de leurs pays, en particulier concernant les semences.

La Déclaration de Djimini



Mais comment produire, gérer, échanger les semences ? Quels défis rencontrent ceux qui essaient de protéger ou récupérer les variétés locales de céréales ?

Pour le découvrir, il faut partir à nouveau, vos semences dans un sac, pour contribuer à l'échange et à la recherche globale.


Protégez vos précieuses graines dans la première banque africaine de semences, en Ethiopie

Partez à la recherche du célèbre riz rouge de Florès (Indonésie)